Le cadre de vie d'autrefois à PLABENNEC et les voies de communications.

 LE CADRE DE VIE : LE BOCAGE. 

Le caractère essentiel du paysage à cette époque est celui du bocage avec pour conséquence une impression d'isolement, de solitude, de cloisonnement liée à l'existence de nombreux talus, à la dispersion de l'habitat et aux difficultés de communication. 

 

a) Un pays "couvert de bois".

La première impression que donne au voyageur le Plabennec de l'époque est celle d'un véritable massif forestier. Où qu'on se trouve, dans toutes les directions, le regard ne porte jamais bien loin ; il bute sans cesse sur un épais rideau d'arbres. Dans ces conditions, tenter une traversée de la paroisse en dehors des routes se révèle être un exercice hasardeux pour les étrangers, comme en témoigne encore en 1832 M. de Fréminville en quête de sites historiques dans notre région.  "Je voulus, nous dit-il, me rendre de Locmaria à Plabennec par les chemins de traverse, et quoique je ne les connusse pas bien, je m'orientai de mon mieux pour arriver au point que je voulais atteindre ; mais dans un canton aussi couvert de bois et parmi les chemins creux, il n'est pas facile de se retrouver... ; aussi je m'égarai ... "  

"Dans un canton aussi couvert de bois", nous dit Fréminville (0)

    Ceci mérite un commentaire. Des forêts, il ne faut point en chercher à l'époque. Celle de Talamon ou Douna, dont nous parlent les vies de St Thénénan et St Goueznou, s'étendait, paraît-il, de l'Elorn à Ploudalmézeau, elle a depuis bien longtemps été rasée par les défrichements et la mise en valeur des terres. 

- Borne Royale de Poulmarc'h  

   Quant aux bois, ils ne représentent au XVIIIe siècle qu'une part infime de la superficie de la paroisse. En 1832 encore, lors de la parution du premier cadastre de Plabennec, ils totalisent moins de 150 hectares. Le plus souvent accrochés aux pentes des vallées, ils n'existent généralement qu'à l'état de bosquets. Seul celui de Lesquelen retient l'attention. Au XVIIIe siècle, il occupe un territoire de 50 à 70 hectares et s'étend de Cléongar à Traon David et Coz Moguérou (1).

   Il joue un rôle dans la vie économique locale, faisant vivre quelques sabotiers et charbonniers. Chose étrange, la commune de Plouvien, qui est au moins aussi boisée que celle de Plabennec, vient y chercher du bois de chauffage durant la Révolution (2). Durant l'hiver, par grand froid, ce bois sert de repaire aux loups, nombreux dans nos campagnes à cette époque.  Des forêts inexistantes, des bois peu nombreux et de faible importance, hormis celui de Lez Kelen, d'où vient alors cette impression de massif forestier que donne la campagne du XVIIIe siècle ? – des talus essentiellement.

    En effet, la paroisse de Plabennec contient à elle seule plus de 10 000 parcelles de taille variable, séparées les unes des autres par de hauts talus sur lesquels poussent arbres et arbustes. Chaque champ est protégé par un épais feuillage et plusieurs centaines de kilomètres de talus quadrillent ainsi la campagne.


Maison ancienne du VIIe

b ) Un habitat dispersé.
Autre phénomène classique du bocage, la dispersion de l'habitat. Sur toute l'étendue de Plabennec on trouve environ 250 villages et hameaux, isolés les uns des autres. Certains de ceux-ci ont disparu de nos jours :

Le Cann près de Kermorvan, Mescoat Menez-Crenn, Feunteun-Coat (près de Kersaint), Pennaneac'h ou Pennanc (près de Locmaria), Prat-Talveze (près de Gouesnou), Cozquer-Salaun, Cozilis (près du Leuhan) (3)

Si la plupart des villages ne comptent qu'une ou deux maisons, quelques-uns groupent pourtant plusieurs fermes et sont très peuplés comme l'Ormeau, Le Vourc'h, Lanorven.

 Suivant les époques, il y a eu variation dans le nombre de pôles. Lesquelen a sans doute été le premier pôle important au Moyen Age. Puis Locmaria et le bourg de Plabennec se sont développés, surtout ce dernier, placé sur la Voie Royale de Brest à Lesneven, alors que les autres se sont trouvés à l'écart des routes importantes. Tous deux sont des centres religieux et possèdent une église et un cimetière. 

Le bourg de Locmaria ne regroupe que quelques fermes autour de l'église et du cimetière et, sans ces témoins religieux rien ne le distingue d'un autre village. 

Le bourg de Plabennec, qu'on désigne parfois encore dans les documents de l'époque sous le nom de Guycabennec, (4) forme par contre une véritable "agglomération". Oh ! bien sûr, il n'y a pas en s'y promenant, grand risque de s'y perdre mais, tout de même, il représente bien plus qu'un simple village. Bien placé sur la route de Brest à Lesneven, il regroupe une trentaine de maisons, des auberges, des échoppes d'artisans, une école, mais aussi des fermes, ce qui lui donne un aspect bien rural. La plupart des logements sont couverts de chaume, bien que déjà se remarquent quelques couvertures d'ardoises comme celle de l'école, tenue par le clergé, située près de l'église. La première école, en tant que telle, a d'abord été communale, construite en 1849, dirigée quelques années plus tard par les Frères de Ploërmel.

Hormis cette église, récente puisqu'elle ne date que de 1720, il n'existe aucun monument particulier. 

c) Des chemins de fortune. 

"Tous les chemins mènent à Rome" affirme un dicton. Encore convient-il de bien choisir la saison, car, à Plabennec, en hiver, certains chemins ne mènent nulle part. (5) 

Pour circuler d'un point à un autre, il existe deux types de voies de communication : les grands chemins et les chemins creux. 

Les grands chemins sont des voies importantes reliant les paroisses entre elles. Ils sont entretenus par les habitants qui y travaillent régulièrement lors des "corvées", impôts payables en journées de travail. Ils sont donc empierrés et des ponts franchissent les rivières. Cependant, leur état laisse parfois à désirer et si, l'été, ils sont praticables, plusieurs se transforment dès les pluies d'automne en d'épouvantables bourbiers, dans lesquels il ne fait pas bon s'aventurer à pied. 

Le chemin de Plabennec à Kersaint est de ceux-là. Inondé de distance en distance, on ne l'utilise si possible qu'à cheval. Quant au chemin de Plabennec à Guipavas, qui débute à Lanoster, il ne faut pas y songer, il est impraticable tout l'hiver. Les exemples de ce type sont nombreux. 

Le chemin de Ploudaniel est, quant à lui, réputé dangereux ; c'est qu'il passe sur les chaussées fort étroites des moulins de la Motte et du Leuhan. En hiver, il y a grand risque de voir glisser sa charrette et ses chevaux dans les écluses ou les étangs. En certains endroits ce "grand chemin" n'est pas bien large. A Creac'h Voudenn par exemple, la voie ne dépasse pas 2 m 50. Deux charrettes ne s'y croisent même pas. 

Ne noircissons pas de trop le tableau ; il existe au moins une bonne route, le grand chemin ( la route royale ) qui relie Brest à Lesneven, puis St Pol, siège de l'évêché. Axe important, il est praticable, hiver comme été, par les piétons, les cavaliers, les charrettes et les diligences, à condition de bien s'accrocher et de ne pas craindre les cahots. 

Les chemins creux sont généralement des voies secondaires qui partent des grands chemins vers les villages isolés, ou des fermes vers les champs. Bordés de hauts talus, ce sont généralement de simples chemins de terre, avec en hiver tous les inconvénients liés à l'eau. Mieux vaut à cette époque passer à travers champs ou monter sur les talus. Imaginez les problèmes que pose, après un décès, le transport du corps quand il faut, à pied, porter le cercueil depuis une ferme isolée jusqu'au bourg de Plabennec ou celui de Locmaria. 

 

(0) - Fréminville : Antiquités de la Bretagne.

(1) - Cadastre de 1832. Plabennec.

(2) - Archives Municipales de Plouvien. Délibération du Conseil Municipal. 1790.

(3) - Cadastre de 1832 et Archives Municipales de Plabennec (il faut signaler que certains villages ne datent que du siècle dernier: Penvern, Kervennec, Stenanc'horn).

(4) - Guycabennec : le bourg d'Abennec.

(5) - Ceci est également vrai pour les autres paroisses.

 


EXTRAITS DE ''VOYAGES DANS LE FINISTÈRE EN 1829, 1830 ET 1831 "

Par J.F. Brousmiche. Éditions Morvran.

Plabennec

"Plabennec est un gros bourg placé sur la grande route, à moitié chemin de Brest à Lesneven. Son église, la seule chose qu'on puisse y remarquer, est grande ; elle est de construction moderne et présente à l'intérieur un aspect flatteur. La décoration en est élégante et contraste parfaitement avec celle de la plupart des temples de nos campagnes qui sont dégoûtants de malpropreté.

Plabennec fut peuplé dans des temps reculés. Le vaste Carneillou druidique découvert par M. de Fréminville près de Lan Kermadec, les pierres qui se trouvent à côté de la Croix des trois Recteurs, en offrent la preuve. Malgré toute leur science, les antiquaires n'ont pu encore déchiffrer les caractères informes que l'on voit gravés sur ces pierres, ni leur assigner un sens quelconque.

A ce témoignage des temps anciens et fabuleux, on peut joindre, dans Plabennec, celui des premiers siècles de l'ère chrétienne. On peut y admirer une de ces forteresses en pierres sèches, de forme conique, élevée sur un monticule, entourée d'un fossé profond ; à côté, la chapelle de Lesquelen présente ses ruines pittoresques. On se prend à rêver près de ces monuments des anciens temps, et l'on se laisse aller au charme de cette rêverie".

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Costumes des hommes vers 1850
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