LE MANOIR DU REST, EN PLABENNEC 
Extrait de " Nos vieux manoirs " de Louis Le Guennec (1968)

"Le manoir du Rest a donné son nom à une antique famille dont était Paul du Rest, sieur du dit lieu, entre les nobles de Ploëbenneuc à la Réformation de 1443. Il passe ensuite à la famille du Beaudiez, originaire de Landunvez, que l'on connaît depuis Bernard du Beaudiez, secrétaire du vicomte de Rohan, qui le chargea en 1449 de la garde de son Châtel de Rohan. La branche aînée s'est fondue dans Rannou, puis Sanzay, mais une branche cadette, qui posséda en Plabennec les deux manoirs du Rest-Locmaria et de la Motte, s'est continuée jusqu'à nos jours.

Le rameau principal du Rest remonte à Bernard de Beaudiez, représenté à la montre de 1503 par Jean, son fils, archer en brigandine, que Guillaume, son fils, remplaça lui-même à celle de 1534 en pareil équipage. A la génération suivante, Jacques du Beaudiez, sieur du Rest, partagea en 1566 avec son cadet Louis, sieur de la Motte, époux de Marie de Kerscau, héritière de Kergoual, en Plouescat. Le Rest appartenait en 1636 à escuyer Gabriel du Beaudiez, mais en 1674, on le trouve tombé aux mains de Mlle du Pontoys, de Landerneau, qui l'afferme moyennant trois cents livres à honorable femme Catherine Thépault, veuve de René Le Moguérou.

Racheté peu après par Ronan du Beaudiez, sieur de la Motte, qui désirait recouvrer ce manoir ancestral, le Rest demeura dans sa descendance jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. Il est actuellement possédé par la famille Le Bescond de Coatpont. Quelques souvenirs des anciens seigneurs du lieu subsistent encore sous la forme d'écussons plus ou moins dégradés et martelés, en saillie çà et là sur les vétustes murailles. J'en dois la lecture à l’obligeance érudite de M. le docteur Charles Laurent. Le plus remarquable est un grand pennon héraldique mutilé, où les armoiries de la maison du Beaudiez : d'or à trois fasces ondées d'azur, au trèfle de même posé en chef au premier canton, mi-parti d'une fasce chargée de trois quintefeuilles, sont placées en abyme, sur un écartelé au un d'un chef chargé de deux ou trois quintefeuilles (?) au deux d'un fretté au trois d'un fascé et saisi ?, au quatre d'un fascé ".

Pour identifier ces armes, il faudrait connaître la généalogie de la première branche du Rest. Au pignon de l'aile droite, se détache encore l'écusson des du Beaudiez, accolé d'un autre écu indiscernable. Le même écusson est répété sur l'arrière-façade, et enfin sur les piliers de l'entrée du jardin, on déchiffre les armes alliées de Ronan, Jaoua du Beaudiez, seigneur du Rest, la Motte, le Mézou, etc..., et de sa femme Marguerite Le Bouteiller de Rochglas. (Losangé d'argent et de sable, une coupe d'or en abyme), mariés en 1729." 

Nouvelle identification des vestiges armoriés, en 2005

        En 2005, nous pouvons faire le point sur les armoiries décrites par Louis Le Guennec et le docteur Laurent Le manoir du Rest, situé à Loc-Maria en Plabennec, est mentionné pour la première fois lors de la Réformation de 1426. Le propriétaire cité à cette date est Paul Gallezen. Les Gallezen, qui portent "échiqueté d’argent et de sable au lion d’or brochant’’, se seraient fondus dans les Du Beaudiez au XVe siècle. Nous avons extrait ces informations du Nobiliaire et armorial de Bretagne de Pol Potier de Courcy*.

        Pour expliquer  les blasons vus par Louis Le Guennec, il faut associer les manoirs du Rest et de la Motte, car ils ont été possédés par les mêmes familles. La généalogie des deux maisons nous permet de reconstruire le grand pennon (non visible).

         Originaires de Landunvez, les Du Beaudiez ont essaimé de nombreuses branches à travers le Léon, et particulièrement dans le pays de Plabennec. Ils blasonnent ‘’d’or à  trois fasces ondées d’azur cantonnées en chef à dextre d’un trèfle de même’’.
En 1449, nous trouvons au Rest Bernard Du Beaudiez, époux de Mahotte de Keraldanet.  La branche aînée issue de leur union s’est fondue dans les familles Rannou et Sanzay.

C’est Jean Du Beaudiez qui relève le fief du Rest et qui est à l’origine de la construction du manoir actuel. Nous trouvons son nom attesté en 1503, date à laquelle il représente son père Bernard dans une montre, mais nous ignorons s’il s’agit du même Bernard que le précédent. Il épouse une dame de Villeneuve, dont la maison blasonne ’d’azur à la fasce d’or accompagnée de  trois quintefeuilles de même’’. 

Leur fils Guillaume Du Beaudiez, cité à la montre de 1534, s’est allié à Marie Riou de Kerméné dont la famille porte : fretté d’argent et d’azur’’. Ils ont deux fils.

L’aîné, Jacques Du Beaudiez, hérite de la propriété. Il épouse en 1575 Jeanne de Lesguern blasonnant ‘’fascé de vair et de gueules de six pièces’’. Le cadet, Louis Du Beaudiez, s’installe au manoir de la Motte. Il épouse Marie de Kerscau dont il aura un fils, Pierre Du Beaudiez, cité seigneur de la Motte en 1615.

          Gabriel Du Beaudiez, fils de Jacques et de Jeanne, épouse Louise de Lescoët dont la famille arbore ‘’de sable à la fasce d’argent chargée de trois quintefeuilles du champ’’. Sa mère Anne de Kerlec’h est issue d’un lignage de très grande notoriété dans la région, pourtant sur ses armes le célèbre fascé d'or et de gueules des Du Chastel

A cette étape, nous sommes en possession de tous les éléments généalogiques pour identifier et expliciter l'ancien grand pennon héraldique du manoir du Rest.  Louis Le Guennec décrit ce vestige et en donne une lecture partielle dans son livre "Nos vieux manoirs à légendes" paru en 1936. S’il identifie à juste titre les armes de Gabriel Du Beaudiez en alliance avec celles de Louise de Lescoët, il reste plus confus sur l’histoire même de ce blason et ne parvient pas à en identifier tous les quartiers. La reconstitution de la généalogie des du Beaudiez permet d’apporter le complément d’informations. 

 * : POTIER DE COURCY (P.), "Nobiliaire et armorial de Bretagne, Editions de la Mayenne, T.1 1993, p. 424.

1 ) Une dame de Villeneuve, épouse de Jean Du Beaudiez, cité en 1503 et 1534. (arrière grand-mère)
2 ) Marie Riou de Kerméné, épouse de Guillaume du Beaudiez vers 1534. (grand-mère) 
3 ) Jeanne de Lesguern, épouse de Jacques du Beaudiez vers 1575. (mère)
4 ) Anne de Kerlec'h, mère de Louise de Lescoët. (belle-mère)

Et sur le tout :

5 ) Gabriel du Beaudiez vers 1600.
6 ) Son épouse Louise de Lescoët.

 

Reconstitution du pennon

     Mais revenons à la généalogie interrompue des propriétaires du manoir.

Gabriel Du Beaudiez meurt en 1659 sans postérité connue. Le manoir est alors vendu en 1673 à une Demoiselle Du Pontoys, originaire de Landerneau, qui le loue à Catherine Thépault, veuve de René Le Mogerou.

C’est en 1674 que Ronan Du Beaudiez et son épouse Anne Du Plessix, sieur et dame de la Motte, rachètent la seigneurie du Rest. Ronan est l’arrière-petit-fils de Louis Du Beaudiez et de Jeanne de Kerscau, personnages déjà succinctement évoqués plus haut. C’est d’eux que sont issus la branche cadette des sires de la Motte, jusqu’au rachat du Rest par Ronan en 1674.

Jacques Du Beaudiez, seigneur de la Motte, et Claude de Penfentenyo de Kermorvan, dont l’union daterait de 1638, sont les parents de Ronan. Les Kermorvan, qui portaient ‘’d’argent à une croix ancrée d’azur’’, étaient un ancien lignage noble implanté à Trébabu, près du Conquet, jusqu’au mariage à la fin du XVIe siècle de l’héritière du domaine avec le puissant sénéchal Tanguy de Penfentenyo. Celui-ci portait le célèbre burelé d’argent et de gueules de dix pièces’’ de sa famille. 

              Claude de Penfentenyo de Kermorvan, l’épouse de Jacques, est leur fille. Les armoiries du pignon nord vues par L. Le Guennec sont composées de deux écus accolés, le premier portant les ‘’trois fasces ondées’’ de Jacques Du Beaudiez, le second présentant un ‘’coupé au 1 : burelé, au 2 : une croix ancrée ou niellée’’.Ce sont les armes en alliance des Penfentenyo et des Kermorvan. propriétaires du manoir de la Motte.

        Ronan Du Beaudiez et Anne Du Plessix ont un fils, Charles Du Beaudiez, seigneur du Rest, ‘’Garde-Marteau‘’*, né en 1679 et décédé vers 1755. Il épouse en 1702 Yvonne Louise Mol de Langolian, dont il sera veuf en 1729. Les Mol blasonnent ‘’d’argent à trois ancres de marine de sable’’.

: Cette charge a été instituée par le roi Henri III en 1583. Officiers des Eaux et Forêts, les garde-marteaux avaient la garde du marteau avec lequel on marquait les bois à couper dans les forêts du Roi. Le garde-marteau assistait aux audiences des ventes.  

De leur union naît en 1703 Ronan-Jaoua Du Beaudiez, seigneur du Rest, de la Motte et du Mézou. Il épouse en 1729 Marguerite Boutouiller, dont la famille porte ‘’losangé d’argent et de sable, une coupe ou calice d’or brochante’’. Ce sont leurs armoiries, dans deux écus ovales accolés et timbrés d’une couronne comtale à neuf perles, que nous pouvons voir à demi-usées sur les piliers de granit de l’entrée principale de la route.

 

Leur fils aîné Michel-Jean-Baptiste Du Beaudiez, né en 1746 et époux de Marie-Emilie Marias en 1770, hérite de la seigneurie du Rest. Le cadet, François-Gabriel Du Beaudiez, épouse Pélagie Loisel et reçoit en apanage le manoir de la Motte. Il se confirme que cette terre était celle décernée aux cadets de la famille.

A la Révolution, les Du Beaudiez émigrent en Angleterre, et tous leurs biens sont confisqués pour être vendus. Le manoir du Rest est acquis en 1794 par Jérôme Berthomme, négociant et maire de Brest de 1791 à 1792 et de 1793 à 1795. Il n’a qu’une fille unique, Armande, qui transmet le manoir et ses terres à la famille Le Bescond de Coatpont, par son mariage en 1810 avec Hyacinthe-Esprit-Marie Le Bescond de Coatpont.

Leur fille Thérèse épouse en 1832 Charles Germain Malmanche, capitaine de frégate et chevalier de la Légion d’Honneur, dont la famille blasonne ‘’d’or à une manche mal taillée de gueules’’. Ils transmettent le Rest à leur fils aîné Gustave-Etienne-Charles-Marie (1834-1887), époux en 1850 de Marie-Louise Piédallu. Ces derniers ont deux enfants : Tanguy Malmanche né en 1875, grand écrivain et dramaturge de langue bretonne, et Jeanne-Louise Malmanche, née en 1872. C’est cette dernière qui hérite du Rest, et qui l’apporte à la famille Le Bescond, par son union en 1893 avec André Le Bescond de Coatpont. Celui-ci, conseiller général de 1912 jusqu’à son décès en 1936, est issu d’une branche collatérale, puisqu’il est l’arrière-petit-neveu de Hyacinthe-Esprit-Marie Le Bescond de Coatpont dont nous avons déjà parlé plus haut.

                       Depuis 1893, Le Rest est resté la propriété des Le Bescond de Coatpont : André Le Bescond et Jeanne Malmanche l’ont transmis à leur fils Jean-Marie-André-Gustave, aîné et seul garçon de leurs sept enfants, et à sa femme Colette-Marie-Thérèse Huchet de Quénétain qui porte ‘’écartelé, aux 1 et 4 : d’argent à trois huchets de sable, et aux 2 et 3 : d’azur à six billettes vidées d’argent, posées 3, 2 et 1’’. Ils sont les parents de l’actuel propriétaire, M. Geoffroy Le Bescond de Coatpont, époux de Mme Chantal de Montfort.

   

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